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OpéraBlog
22 janvier 2017

Kaufmann est de retour !

C'est une impatience tangible qui agitait l'immensité de Bastille en ce samedi soir : Jonas Kaufmann, star parmi les stars, y interprétait le rôle-titre de Lohengrin après plusieurs mois de silence forcé, silence enfin brisé mercredi pour la première. Dans la salle, s'élèvent les premières notes du prologue, un prologue qui tire les larmes. Tous les pupitres de l''Orchestre de l'Opéra National de Paris se couvrent de gloire sous la baguette d'un Philippe Jordan rarement aussi inspiré. Depuis la fosse, il dessine le monde révolu de Lohengrin, un monde fait de fêtes grandioses, de conquêtes héroïques et d'invocations à des dieux oubliés. La musique oscille entre la jubilation populaire et les intrigues sourdes, entre la lumière et la noirceur. Philippe Jordan saisit particulièrement bien ces contrastes et sait les mettre en valeur tout en gardant une vision d'ensemble.

 

Kaufmann Serafin Lohengrin Bastille, 2017

Cette direction musicale s'adapte parfaitement à la mise en scène de Claus Guth. Celui-ci situe l'action juste avant la révolution de mars 1848, dans une époque d'instabilité politique et d'incertitude. Au centre d'un palais, l'intrigue se joue dans un espace tantôt chambre, tantôt cour, tantôt jardin. Certaines scènes sont empreintes d'une grande poésie, comme la nuit de noces au bord d'une étendue d'eau entourée de roseaux. D'autres, comme les invocations d'Ortrud aux dieux germaniques, véhiculent une sourde violence.Kaufmann Lohengrin, Bastille 2017

Dans ce monde malade empreint de mélancolie, évoluent des personnages aux caractères complexes et fouillés. Les seuls à échapper à ce travail poussé sont le Hérault et le roi Heinrich. Il est vrai cependant que le livret ne leur offre pas de véritable psychologie. Efils Silins prête au Hérault une belle voix de baryton-basse, très bien projetée dans une salle à l'accoustique si peu flatteuse. On ne présente plus René Pape qui incarne les grands rôles de basse wagnérienne dans les plus grandes salles du globe. Son timbre cuivré et autoritaire conviennent parfaitement à Heinrich, rôle quelque peu statique certes mais intéressant quand bien chanté.Pape Serafin Lohengrin, Bastille, 2017

Dans l'intrigue manichéenne de Lohengrin, Friedrich et, encore plus, a femme Ortrude incarne le mal et la méchanceté. Wolfgang Koch en tuteur corrompu d'Elsa se montre particulièrement convaincant au premier acte. Il livre une prestation plus qu'honorable dans les actes suivants mais l'on sent la fatigue le gagner au fur et à mesure de la soirée. Evelyn Herlitzius campe une maîtresse femme impressionante, aussi bien dans son chant que dans son jeu. Voix large et puissante, aigus sûrs et timbre déployant mille petites lames acérées, elle captive le spectateur d'emblée. Son jeu est impeccable et particulièrement intelligent. Elle évite de faire d'Ortrud une bonne femme pratiquant la magie noire. Au contraire, elle incarne une princesse fière et orgueilleuse au port altier et aux invocations magiques terribles.Herlitzius Lohengrin, Bastille 2017

Face à ce premier couple, les deux héros : Elsa et Lohengrin. Martina Serafin n'est pas vraiment l'héroïne blonde et pure qu'on attend mais l'interprétation vocale est exempte de tout reproche. Scéniquement, la soprano autricheinne est très crédible et est une partenaire plus qu'accetable pour la vedette de la soirée... Car c'est avant tout Jonas Kaufamnn qu'on est venu entendre et voir et c'est lui qui donne le plus de satisfaction. Après avoir beaucoup craint pour lui, on le retrouve dans une très bonne forme vocale. On l'a connu plus téméraire, c'est vrai, mais la prudence du chanteur devient ainsi la fragilité du héros. En anti-héros égaré, le ténor allemand trouve un personnage parfaitement adapé à ses qualités artistiques. Car ce qu'il sait si bien exprimer, c'est la douleur et la faille dans l'armure du chevalier. Son Lohengrin est aux antipodes du combattant vindicatif, il est faible et introverti, perdu dans un monde où il ne trouve pas sa place. Ici, le timbre sombre et mélancolique du chanteur bavarois, ses pianissimi murmurés à l'oreille du spectateur se mettent au service de la conception de Claus Guth. La puissante ovation qui l'accueille à la fin du spectacle remercie Jonas Kaufmann d'être revenu à l'Opéra avec tant de brio.Kaufmann Serafin Lohengrin, Bastille, 2017

Lohengrin, opéra romantique en trois actes de Richard Wagner sur un livret de Richard Wagner, 1850

Lohengrin : Jonas Kaufmann

Elsa von Brabant : Martina Serafin

Heinrich der Vogler : René Pape

Friedrich von Telramund : Wolfgang Koch

Ortrud : Evelyn Herlitzius

Der Heerrufer des Königs : Egils Silins

Vier brabantische Edle : Hyun-Jong Roh, Cyrille Lovighi, Laurent Laberdesque, Julien Joguet

Vier Edelknaben : Irina Kopylova, Corinne Talibart, Laetitia Jeanson, Lilia Farkas

 

Direction musicale : Philippe Jordan

Mise en scène : Claus Guth

Orchestre et choeur de l'Opéra National de Paris

Opéra Bastille, 21 janvier 2017Kaufmann Lohengrin, Bastille, 2017

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1 janvier 2017

Résultats chanteur et chanteuse de l'année 2016

Les résultats des élections du chanteur et de la chanteuse OpéraBlog de l'année 2016 sont tombés...

Chez les hommes, Yann Beuron et Michael Spyres obtiennent 11 % des voix chacuns John Osborn et Jonas Kaufmann sont deuxième à ex-aequo avec chacun 22 % des voix. Enfin, le péruvien Juan Diego Florez se hisse à la première place avec 34 % des votes.

Juan Diego Florez a partagé cette année entre son répertoire traditionnel qu'est le belcanto et l'opéra français qu'il esten train de découvrir. Il a notamment fait ses débuts dans le rôle-titre de Werther au Théâtre des Champs Elysées et en Raoul des Huguenots de Meyerbeer. Le ténor péruvien a surtout fêté les vingt ans de ses débuts sur la scène mondiale effectués en 1996 dans Matilde di Shabran au ROF. Il a donné un concert d'anniversaire à Pesaro et y interprété le rôle de Giacomo dans La Donna del Lago.

Florez La Donna del Lago ROF 2016

Chez les femmes, les soprano russes Olga Peretyatko et Anna Netrebko obtiennent chacune 11 % des voix, ainsi que la mezzo française Karine Deshayes. Sabine Devieilhe, Joyce DiDonato et Sonya Yoncheva se partagent la première place avec 22 % des voix chacunes.

Sabine Devieilhe a enchanté le public parisien en Ismène dans Mitridate de Mozart puis avec le rôle-titre de La Sonnambula de Bellini  au TCE. Elle a repris le rôle qui l'a rendue célèbre, Lakmé, au Grand Théâtre d'Avigon. Elle s'est illustrée en Bellezza du Trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel à Aix-en-Provence.

Devieilhe Il Trionfo del Tempo e del Disinganno, Aix en Provence, 2016

Joyce DiDonato s'est illustrée cette année avec son nouveau disque paru chez Erato In War and Peace. Elle y aborde des airs baroques célèbres comme "When I am laid" de Purcell ou "Lascia ch'io pianga" Haendel et des airs moins connus tels "Sprezza il furor del vento" et "Par che di giubilo" de Jommelli. Tous illustrent la guerre et la paix dans ce récital salué unanimement par la critique. Elle a également fait ses premiers pas chez Massenet en Charlotte de Werther au TCE aux côtés de Juan Diego Florez puis au Royal Opera House avec Vittorio Grigolo.

In War and Peace Erato 2016

Sonya Yoncheva était présente sur les grandes scènes lyriques mondiales cette année dans un répertoire très vaste : Alcina à Versailles et Monte-Carlo, Iolanto et La Traviata à l'Opéra National de Paris, La Traviata à Munich, La Bohème au Met, Antonia des Contes d'Hoffmann à Londres, Thaïs aux cotés de Placido Domingo à Salzburg, Tatiana d'Eugène Onéguine à Berlin. Mais on a surtout parlé d'elle pour sa Norma à Londres, en remplacement d'Anna Netrebko. Elle a su y interpréter une Norma poignante et vocalement parfaite malgré sa jeunesse pour le rôle.

Yoncheva Norma, ROH, 2016

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