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OpéraBlog
5 octobre 2018

Chapeau bas !

Critique de MIROIR(S)

Depuis 2015, année qui l'a vue gagner le concours "Neue Stimmen", la place de "Révélation lyrique" des Victoires de la musique classique et le second prix du concours Reine Sonja, Elsa Dreisig s'est imposée comme une jeune voix française avec laquelle il faut compter. Membre de la troupe du Staatsoper de Berlin et régulièrement invitée en France où on a déjà pu l'applaudir, entre autres, en Lauretta et  en Pamina à l'Opéra de Paris ainsi qu'en Micaëla à Aix-en Provence, la jeune soprano a également eu la chance de signer un contrat chez Erato. Voici donc son premier récital, dédié au thème du miroir, celui dans lequel se contemplent Marguerite et Thaïs, celui qui opposent les Manon de Puccin et Massenet, les Juliette de Steibelt et Gounod, les Rosina de Rossin et Mozart, les Salomé de Massenet et Strauss.

Ce qui frappe d'emblée à l'écoute du CD, c'est la fraîcher d'un timbre clair mais immédiatement séduisant, un aplomb étonnant allié à une très belle musicalité. Sans aucun doute, Elsa Dreisig possède une voix somptueuse aux aigus lumineux et au médium velouté. La jeune soprano peut également se flatter d'une jolie diction française et d'un beau tempérament dramatique. Le récital s'ouvre ainsi sur un "Ah ! Je ris de me voir si belle" frémissant de jeunesse et de coquetterie. Thaïs met la jeune femme un peu moins en valeur, peut-être parce que les aigus sur "dis-moi que je serai belle pour l'éternité" ne sont pas assez voluptueux. La Manon de Massenet convient parfaitement à sa voix comme au stade de sa carrière. "Adieu à notre petite table" est, en conséquence, une plage émouvante, toute mélancolie retenue. Il est évident qu'Elsa Dreisig ne peut pas (encore ?) aborder la Manon de Puccini en intégralité et à la scène. Le temps d'un air, cependant, elle en endosse crânement le rôle, offrant un "In quelle trine morbide" débordant de sensualité et de désir. Les deux Rosine mises en perspective par le programme offrent à Elsa Dreisig l'occasion de faire étalage de virtuosité et de malice chez Rossini. On s'attendait bien peu à l'entendre en Salome de Strauss et encore moins dans la version française d'après Oscar Wilde. La surprise est plutôt agréable, Elsa Dreisig habitant avec conviction la Salomé sanguinaire dépeinte par l'écrivain. A des années lumières de ce personnage monstrueux, Elsa Dreisig reste en terrain connu avec "Il est doux, il est bon", l'air de la Salomé de Massenet. Dans Hérodiade, le compositeur propose un personnage bien plus amoureux et rêveur qu'Elsa Dreisig dote d'une ligne de chant envoûtante et d'aigus dardés comme des poignards. Mais ce sont les deux Juliette du récital que nous avons préférées. La première, celle de Steibelt, est une rareté que l'on découvre avec plaisir. Contrairement à certaines exhumations d'airs dont on se passerait bien, celle-ci permet de découvrir une belle page, dramatiquement intéressante et riche en vocalises vertigineuses. Elsa Dreisig en propose d'ailleurs une interprétation en forme de feux d'artifice vocal. Quant à la scène du poison du bien plus célèbre opéra de Gounod, on y découvre la chanteuse bouleversante, concluant l'air par un "Roméo, je viens à toi" triomphant.

Un très beau CD en somme, très prometteur et témoignant de l'audace et de l'intelligence de l'artiste.


Miroirs Elsa Dreisig Erato 2018

MIROIR(S)

Elsa Dreisig, soprano

Orchestre national de Montpellier Occitanie

Direction musicale : Michael SchØnwandt

 

 

1.      « Les grands seigneurs... Ah ! Je ris de me voir si belle» - Faust - Charles Gounod

2.      « Ah ! Je suis seule... Dis-moi que je suis belle » - Thaïs - Jules Massenet

3.      «  In quelle trine morbide » - Manon Lescaut - Giacomo Puccini

4.      « Allons, il le faut !... Adieu notre petite table» - Manon - Jules Massenet

5.      « Je vais donc usurper les droits de la nature » - Roméo et Juliette - Daniel Steibelt

6.      « Dieu ! Quel frisson court dans mes veines ? » - Roméo et Juliette - Charles Gounod

7.      « Una voce poco fa» - Il Barbiere di Siviglia - Gioacchino Rossini

8.      « Porgi, amor» - Le Nozze di Figaro - Wolfgang Amadeus Mozart

9.      « Celui dont la parole efface toutes peines... Il est doux, il est bon» - Hérodiade - Jules Massenet

10.    « Ah ! Tu n'as pas voulu » - Salomé - Richard Strauss

CD Erato 2018

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