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OpéraBlog

31 mai 2016

Les festivals européens (2016)

Que voir cet été dans les nombreux festivals lyriques européens ? OpéraBlog vous propose une sélection des spectacles à ne pas manquer.

Festival Castell Peralda

Les fidèles de Peralda comme les simples passionnés d’art lyrique ne manqueront pas le 30 years Gala qui célèbrera les trente ans du festival. Daniele Rustioni dirigera l’Orquestra Sinfonica de Barcelona i nacional de Catalunya tandis que Ruggero Raimondi sera chargé de la mise en espace du concert. Il se joindra à Sondra Radvanovsky, Eva-Maria Westbroek, Carlos Alvarez, Marcelo Alvarez et Leo Nucci pour interpréter une poignée d’airs de Giordano, Puccini, Verdi, Rossini, Massenet…

30 years Gala

Direction musicale : Daniele Rustioni

Mise en espace : Ruggero Raimondi

Avec Sondra Radvanovsky, Eva-Maria Westbroek, Carlos Alavarez, Marcelo Alvarez, Leo Nucci, Ruggero Raimondi

Orquestra Sinfonica de Barcelona i nacional de Catalunya

15 juillet 2016

Rossini Opera Festival (Pesaro)

On retrouvera cette année Juan Diego Florez sur la scène qui l’a propulsé dans le monde lyrique dans La Donna del Lago. A ses côtés, le Rodrigo de Michael Spyres devrait faire des étincelles. Côté « opera buffa », Il Turco in Italia sera à l’affiche du Teatro Rossini avec Olga Peretyatko dans le rôle de Fiorilla et un trio masculins alléchants : ErwinSchrott en turc, Nicola Alaimo en mari trompé et Pietro Spagnoli en poète inspiré.

Florez Peretyatko Matilde di Shabran, Pesaro, 2012

La Donna del Lago, G. Rossini

Direction musicale : Michele Mariotti

Mise en scène : Damiano Michieletto

Avec Salome Jici (Elena), Juan Diego Florez (Uberto/Giacomo V), Michael Spyres (Rodrigo), Varduhi Abrahamyan (Malcolm)...

Orchestra e coro del Teatro communale di Bologna

8, 11, 14, 17 août 2016

Il Turco in Italia, G. Rossini

Direction musicale : Speranza Scappucci

Mise en scène : Davide Livermone

Avec Olga Peretyatko (Fiorilla), Erwin Schrott (Selim), Nicola Alaimo (Geronio), Pietro Spagnoli (Prosdocimo)...

Filarmonica Rossini

9, 12, 15, 18 août 2016

Salzburger Festspiele

Le prestigieux festival autrichien propose cette année encore un programme si alléchant qu’il mériterait de figurer en entier sur cette page. Cependant, nous sommes forcés de faire un choix aussi ne retiendrons nous que trois titres : Faust qui bénéficiera d’une version scénique, Manon Lescaut avec à l’affiche Anna Netrebko et Yusif Eyvazov et Il Templario. Ce dernier est un opéra belcantiste d’Otto Nicolai redécouvert dans les années 90 mais resté peu joué. Joyce DiDonato et Juan Diego Florez sont sans doute les plus à même de présenter sous son meilleur jour une œuvre enracinée dans leur répertoire de prédilection.Abdrazakof Beczala Faust, Bastille, 2015

Faust, C. Gounod

Direction musicale : Alejo Pérez

Mise en scène Reinhard von der Thannen

Avec Piotr Beczala (Faust), Maria Agresta (Marguerite), Ildar Abdrzakof (Méphisto)...

Wiener Philarmoniker

10, 14, 17, 20, 23, 26, 29 août 2016

Manon Lescaut, G. Puccini

Direction musicale : Marco Armiliato

Version concertante

Avec Anna Netrebko (Manon Lescaut), Yusif Eyvazov (Des Grieux)...

Münchner Rundfunkorchester

1, 4, 7 août 2016

Il Templario, O. Nicolai

Direction musicale : Andrés Orozco-Estrada

Version concertante

Avec Juan Diego Florez (Vilfredo d’Ivanhoe), Joyce DiDonato (Rebecca), Adrien Sâmpetrean (Cedrico il Sassone)...

Wiener Philarmoniker

27, 30 août 2016

Chorégies d’Orange

On n’attend pas des Chorégies d’Orange de nous faire découvrir de nouveaux titres. Nous conseillerons donc à nos lecteurs d’aller voir deux titres du « grand » répertoire : Madama Butterfly et La Traviata. On ose espérer qu’ils ne seront pas déçus car il y aura à l’affiche Ermonela Jaho en Cio-Cio San et Diana Damrau en Violetta.Damrau Domingo, La Traviata, Met, 2013

Madama Butterfly, G. Puccini

Direction musicale : Mikko Franck

Mise en scène : Nadine Duffaut

Avec Ermonela Jaho (Cio-Cio San), Bryan Hymel (Pinkerton), Marie-Nicole Lemieux (Suzuki)...

Orchestre philarmonique de Radio France

9, 12 juillet 2016

La Traviata, G. Verdi

Direction musicale : Daniele Rustioni

Mise en scène : Louis Désiré

Avec Diana Damrau (Violetta Valéry), Francesco Meli (Alfredo Germont), Placido Domingo (Giorgio Germont)…

Orchestre national Bordeaux-Aquitaine

3, 6 août 2016

Festival d’Aix-en-Provence

C’est à Aix qu’il faudra aller cette année pour entendre les grandes voix françaises : Stéphane Degout et Laurent Naouri dans Pélléas et Mélisande et Sabine Devielhe dans Il Trionfo del tempo e del disinganno. A noter aussi que l’opéra de Haendel sera joué par le Concert d’Astrée, dirigé bien-entendu par Emmanuelle Haïm.Devielhe Spyres, Mitridate, Théâtre des Champs Elysées, 2016

Pélléas et Mélisande, C. Debussy

Direction musicale : Esa-Pekka Salonen

Mise en scène : Katie Mitchell

Avec Stéphane Degout (Pélléas), Barbara Hannigan (Mélisande), Laurent Naouri (Golaud)...

Cape Town Philarmonia Orchestra

2, 4, 7, 13, 16 juillet 2016

Il Trionfo del tempo e del disinganno, G.F. Haendel

Direction musicale : Emmanuelle Haïm

Mise en scène : Krzystof Warlikowski

Avec Sabine Devielhe (Bellezza),  Sara Minyardo (Disinganno), Franco Fagioli (Piacere), Michael Spyres (Tempo)

Le Concert d’Astrée

1, 4, 6,9, 12, 14 juillet 2016

Bayerische Staatsoper Opernfestspiele

Cette année, à Munich, on ne manquera pas La Juive, grand opéra français trop rarement donné, d’autant plus qu’on pourra y entendre Roberto Alagna et John Osborn dans les rôles respectifs de Eléazar et Léopold. Aleksandra Kurzak, annoncée dans le rôle d’Eudoxie, a surpris le monde lyrique en acceptant de remplacer Kristine Opolais en Rachel. On est impatient de voir si le choix est bon. Bien-sûr, on profitera d’être dans la ville pour acclamer ses deux favoris, Jonas Kaufmann et Anja Harteros. Le premier chante dès maintenant jusqu’en juillet dans Die Meistersinger von Nürnberg et la seconde dans Der Rosenkavalier, où elle n’a pas de rivale en Maréchale. On retrouvera le couple dans Tosca aux côtés du terrifiant Scarpia de Bryn Terfel.

Harteros Kaufmann Don Carlo, Salzburg, 2013

La Juive, F. Halévy

Direction musicale : Bertrand de Billy

Mise en scène : Calixto Bieito

Avec Aleksandra Kurzak (Rachel), Roberto Alagna (Eléazar), John Osborn (Léopold)…

Bayerisches Staatsorchester

26, 30 juin, 4, 8 juillet 2016

Die Meistersinger von Nürnberg, R. Wagner

Direction musicale : Kirill Petrenko

Mise en scène : David Bösch

Avec Jonas Kaufmann (Walther von Stolzing)…

Bayerisches Staatsorchester

4 juin, 28, 31 juillet 2016

Tosca, G. Puccini

Direction musicale : Kirill Petrenko

Mise en scène : Luc Bondy

Avec Anja Harteros (Floria Tosca), Jonas Kaufmann (Mario Cavaradossi), Bryn Terfel (Scarpia)...

Bayerisches Staatsorchester

25, 28 juin, 1er juillet 2016

Der Rosenkavalier, R. Strauss

Direction musicale : Kirill Petrenko

Mise en scène : d’après Jürgen Rose et Otto Schenk

Avec Anja Harteros (die Feldmarschallin)…

Bayerisches Staatsorchester

14, 17 juillet 2016

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17 avril 2016

Historique

Soirée historique entre toutes que celle-ci. Tout d’abord, cette série de représentations est la première de Roberto Devereux proposée par le Met. Ensuite, Sondra Radvanovsky chantait sa deux centième représentation au Metropolitan Opera de New York. De plus, cette même chanteuse parachevait aujourd’hui son parcours de la trilogie Tudor de Donizetti. Après avoir chanté Anna Bolena et Maria Stuarda cette saison à New York, la soprano russe offrait au public, non seulement du Met, mais aussi du monde par le biais de la retransmission en live le dernier portrait de reine : Elisabetta. Enfin, et c’est surtout pour cette raison qu’on retiendra cette représention, nous avons assisté ce soir à ce que doit être un opéra, c’est-à-dire une parfaite adéquation entre musique et théâtre portée par une direction et des chanteurs-acteurs d’exception.

La direction de Maurizio Benini a sans doute été un des meilleurs atouts de la production. Dès une ouverture énergique, riche en nuances et en changements d’atmosphère, le chef pose les bases de sa vision de l’œuvre : un dramatisme puissant fait de colère et de jalousie tonitruantes et d’intériorisation douloureuse.

David McVicar de son côté a opté, comme à son habitude, pour une mise en scène plutôt traditionnelle. L’action se passe dans un décor unique noir et doré extrêmement pesant et sombre. Sur les côtés en hauteur, deux balcons pour les chœurs, trois portes dans le fond et des allégories du temps (l’horloge cachée derrière le mur du fond, le sablier) complètent le tableau. Dans ce théâtre angoissant, le metteur en scène installe une direction d’acteurs particulièrement intense. Chaque personnage s’abandonne à la violence de ses émotions avec une véracité stupéfiante.

Garanca Polenzani Roberto Devereux, Met, 2016

Pour ce qui ce qui est du chant, le Met s’est offert comme si souvent le luxe d’une distribution sans tache. Tout d’abord, que dire de Sondra Radvanovsky sinon qu’elle est parfaite dans son rôle de bout en bout. Depuis son entrée en reine toute puissante et cruelle jusqu'à sa folie et à sa mort de femme brisée, elle délivre une performance passionante, tant sur le plan vocal que sur le plan dramatique où elle offre des moments captivants, notamment son duo avec Kwicien qui devient par la suite un trio avec Polenzani.

Radvanovsky Roberto Devereux, Met, 2016

Pour rester chez les dames, parlons d’Elina Garanca. La première chose qui frappe, c’est évidemment la beauté de cette voix que l’on ne vantera jamais assez, ce timbre grave, rond, plein et sensuel. Mais comment n’être pas également sensible à ce chant expressif et souple qui se plie à toutes les vocalises de la partition et à toutes les émotions du livret. Dans son premier air, « All’afflito è dolce il piante », et ce jusqu’au duo avec Devereux, la mezzo lettone incarne une femme mélancolique, abattue et douloureusement tiraillée par son devoir d’épouse. Le duo avec Devereux la voit changer du tout au tout. Elle devient une amante tragique et sacrificielle. C’est peut-être alors là qu’on l’a préférée tant elle habite ce personnage avec une force peu commune. Le duo du III avec le duc de Nottingham est donc un aboutissement et dans ce déchainement de passions violentes Elina Garanca nous prouve ce qu’elle est : une artiste au sommet de son art.

Garanca Roberto Devereux, Met, 2016

Chez les messieurs, on ne peut également que louer les deux chanteurs principaux. Mariusz Kwiecien trouve en Nottingham un personnage sur mesure pour son baryton chatoyant et profond. Tout le premier acte et le début du deuxième le montrent en ami dévoué, brisé par la possible condamnation de Devereux. Evidemment, on sent déjà poindre dans « Forse in quel cor sensibile » le mari jaloux mais c’est surtout en ami loyal dans la cabalette que le baryton polonais impressionne. En effet, on peut ici constater que Mariusz Kwiecien est en ce moment dans une forme vocale impressionnante. Il ne fait qu’une bouchée des difficultés toutes belcantistes de sa cabalette. Au II, il est tout simplement bouleversant dans son trio avec Elisabetta et Devereux. Que dire de ce « Sara ! » chanté comme dans un murmure où l’on entend déjà l’orage gronder quand Elisabetta confronte Devereux à sa trahison ? C’est dans son duo avec Sara qu’il atteint les cimes. En mari jaloux, ivre de vengeance et de sang, Mariusz Kwiecien est effrayant. Son chant puissant, autoritaire et son timbre de bronze mis au service d’une incarnation du personnage époustouflante n'y sont pas pour rien.

Garanca Kwiecien Roberto Devereux, Met, 2016

Enfin, Matthew Polenzani triomphe dans le rôle-titre. Grand habitué de Donizetti puisqu’il a chanté (liste non-exhaustive) Nemorino (L’elisir d’amore), Ernesto (Don Pasquale), Edgardo (Lucia di Lammermoor) et Leceister (Maria Stuarda), il possède cet art de la vocalise, ce rafinement dans la ligne de chant et ces nuances piano/pianissimo qui font de lui le meileur interprète actuel du rôle. En héros perdu par un destin impitoyable, déchiré entre la femme qui l’aime et qui doit lui donner le pouvoir, la femme qu’il aime et le mari de cette dernière qui se trouve être son meilleur ami, le ténor américain fait d’abord preuve de vaillance et même de violence dans son duo avec Elisabetta – Ah ! « Un tenero cor » fut-il jamais plus contrasté entre cette froide colère conte la reine et ces élans de tendresse pour Sara ?- avant de s’enfermer dans une douloureuse introspection. Son dernier air le montre royal dans la maîtrise de son personnage et de son chant.

Polenzani Radvanovsky Roberto Devereux, Met, 2016

On l’aura compris, cette soirée restera dans les mémoires.Kwiecien Radvanovsky Roberto Devereux, Met, 2016

Roberto Devereux, opéra en trois actes de Gaetano Donizetti sur un livret de Salvatore Cammarano, 1837

Roberto Devereux, Conte di Essex : Matthew Polenzani

Lord Duca di Nottingham : Mariusz Kwicien

Sara, Duchessa di Nottingham : Elina Garanca

Elisabetta, Regina d’Inghilterra : Sondra Radvanovsky

Lord Cecil : Brian Downen

Sir Gualtiero Raleigh : Christopher Job

Un paggio : Yohan Yi

Un familiare di Nottingham : Paul Corona

 

Direction musicale : Maurzio Benini

Mise en scène : David McVicar

Orchestre et chœur du Metropolitan Opera

Retransmis en direct du Metropolitan Opera, le 16 avril 2016

4 avril 2016

Ludovic Tézier et Jonas Kaufmann magistraux

Cette production de La Forza del Destino était un temps fort de la saison 2013/2014 du Bayerische Staatsoper. Elle est maintenant proposée en DVD par Sony Classical, maison de disques de Jonas Kaufmann.

Harteros Kowaljow La Forza del Destino, München, 2014 

Ne nous mentons pas, c'est d'abord pour sa distribution vocale que ce DVD vaut d'être regardé. Et quelle distribution ! Elle réunit en effet trois des meilleurs chanteurs verdiens d'aujourd'hui, Anja Harteros, Jonas Kaufmann et Ludovic Tézier, entourés d'excellentes voix comme celles de Nadia Krasteva et de Vitalij Kowaljow. 

Kaufmann Tézier La Forza del Destino, München, 2014

 

 

Nadia Krasteva, pour commencer, est une Preziosilla de très bonne école. Timbre chaud et graves amples, particulièrement mise en valeur dans le "Rataplan", la mezzo bulgare sait également éviter la vulgarité dans laquelle tant d'interprètes font tomber la gitane. 

Krasteva La Forza del Destino, München, 2014

 

 

 

Anja Haretros s'impose dès ses premières notes comme une Leonora captivante. On ne vantera jamais assez son timbre chatoyant d'authentique soprano dramatique aux aigus lumineux et aux multiples couleurs tantôt chaudes tantôt glacées. Impressionnante de bout en bout dans son rôle d'héroïne frappée par le destin, la soprano allemande se distingue par une prestance de grande classe et un chant tout en raffinement et en détails.

Harteros La Forza del Destino, München, 2014

 

Du côté des messieurs, Renato Girolami campe un Fra Melitone vocalement impeccable aux vocalises soignées et à l'authentique timbre de baryton bouffe. Théâtralement, on a connu des Melitone plus truculents mais celui-ci possède déjà un chant si convaincant qu'on ne lui en tient pas rigueur.

Girolami La Forza del Destino, München, 2014

Vitalij Kowaljow s'est vu confier non seulement le rôle du Marchese di Calatrava mais aussi celui de Padre Guardiano. Convainquant aussi bien dans l'un que dans l'autre, Vitalij Kowaljow impose sa profonde voix de basse à la noirceur lumineuse et un jeu autoritaire. 

Harteros Kowaljow La Forza del Destino, München, 2014

Mais les sommets de la soirée sont atteints par le duo d'exception formé par Joans Kaufmann et Ludovic Tézier. Séparément, le ténor bavarois et le baryton français sont déjà époustouflants : au premier, le timbre sombre et mélancolique du héros torturé, les pianissimi d'une douceur incomparable et les dons théâtraux indéniables, au second, l'authentique voix de baryton verdien, la ligne de chant d'une noblesse sans pareil et  le timbre brillant. Mais dans leurs nombreux duos, les deux chanteurs font merveille. Le "Solenne in quest'ora" est à couper le souffle quand ces deux voix s'entremêlent dans l'ultime témoignage d'une amitié vouée à la destruction. Quant à leur confrontation du IV, elle justifie à elle seule l'enregistrement tant il est rare d'entendre et de voir une telle cohésion musicale et dramatique. Que dire enfin sinon que c'est sans doute la meilleure version de cette scène ?

Kaufmann Tézier, La Forza del Destino, Münich, 2013

La mise en scène de Martin Kušej avait lors de la création suscité beaucoup de critiques. Nous n'en avons pas été choqués. L'action est située à notre époque dans un pays en guerre. Cette actualisation n'altère en rien l'intrigue et on lui doit même de belles images telle cette pièce renversée au début du III. On apprécie également l'idée d'avoir fait de Padre Guardiano une "réincarnation" de Calatrava. Ainsi le personnage du père ayant renié sa fille devient plus humain puisqu'il revient la protéger. De même, l'opéra s'ouvrant sur la table familiale des Calatrava et se fermant sur cette même image avec, en plus, Alvaro qui s'en éloigne est une idée qui a emporté tous nos suffrages.

Harteros Kaufmann Kowaljow Tézier La Forza del Destino, München, 2014

 

 

Quoi qu'il  en soit, cette version de La Forza del Destino est à acquérir à tout prix pour sa superbe distribution vocale menée par le duo Jonas Kaufmann/Ludovic Tézier.

La Forza del Destino Sony Classical

La Forza del Destino, Opéra de Giuseppe Verdi sur un livret de Francesco Maria Piave, 1862

Don Alvaro : Jonas Kaufmann

Don Carlo di Vargas : Ludovic Tézier

Leonora : Anja Harteros

Preziosilla : Nadia Krasteva

Marchese di Calatrava / Padre Guardiano : Vitalij Kowaljow

Fra Melitone : Renato Girolami

Curra : Heike Grötzinger

Un alcade : Christian Rieger

Maestro Trabuco : Francesco Petrozzi

Un chirurgo : Rafal Pawnuk

 

Directin musicale : Asher Fisch

Mise en scène : Martin Kušej

Orchestre et Choeur du Bayerische Staatsoper

Enregistré au Bayerische Staatsoper en 2014

17 février 2016

Distributions luxueuses pour le Met en 2016-2017

Fidèle à ses habitudes, le Metropolitan Opera de New-York proposera pour la saison 2016-2017 des spectacles du répertoire avec, à l'affiche les chanteurs,  les plus demandés du monde lyrique.

Tout d'abord, la saison s'ouvrira avec un Gala des 50 ans du Met au Lincoln Center. Pour l'occasion, Peter Gelb a invité vingt-sept artistes dont Juan Diego Florez, Joyce DiDonato, Anna Netrebko...

Didonato Mattei Il Barbiere di Siviglia, Met, 2007

 

L'opéra italien sera bien servi cette année avec quatre opéras de Verdi (Aida, Nabucco avec Placido Domingo, Rigoletto avec Olga Peretyatko et Joseph Calleja et La Traviata avec Sonya Yoncheva, Michael Fabiano et Thomas Hampson), trois opéras de Rossini (Il Barbiere di Siviglia avec Peter Mattei, Pretty Yende et Javier Camarena, Guillaume Tell après plus de 80 ans d'absence avec Marina Rebeka, Mariana Pizzolato, John Osborn et Bryan Hymel en alternance, L'Italiana in Algeri avec Nicola Alaimo et Ildar Abdrazakof) et deux opéras de Puccini (La Bohème avec Piotr Beczala en Rodolfo, Sony Yoncheva et Kristine Opolais en Mimi, Manon Lescaut avec Anna Netrebko et Marcelo Alvarez). Ajoutons à cela I Puritani avec Diana Damrau, Javier Camarena et Luca Pisaroni.Kwiecien Peretyatko I Puritani, Met, 2015

L'opéra français sera également mis à l'honneur avec les débuts en Carmen de Sophie Koch entourée par Marcelo Alvarez et Maria Agresta. Roberto Alagna, Patricia Racette et Atalla Ayan seront à l'affiche de Cyrano de Bergerac. Diana Damrau et Vittorio Grigolo, après avoir chanté Manon la saison dernière, se retrouveront dans Roméo et Juliette. Vittorio Grigolo sera également Werther dans une reprise de la mise en scène de Richard Eyre aux cotés de la Charlotte d'Isabel Leonard.Damrau Grigolo Manon, Met, 2015

Mais cette année on verra aussi beaucoup d'opéras allemand avec notamment Der Rosenkavalier avec Renée Fleming, Elina Garanca et Matthew Polenzani et Salome avec Catherine Naglestad. Don Giovanni de Mozart bénéficiera d'une distribution particulièrement alléchante : Simon Keenlyside, Ildar Abdrazakof, Mariusz Kwiecen dans le rôle titre, Erwin Schrott en Masetto, Rolando Villazon, Ramon Vargas, Matthew Polenzani en Don Ottavio, Marina Rebeka en Donna Elvria, Serena Malfi, Nadine Sierra et Isabel Leonard en Zerlina. Idomeno sera également mis à l'honneur avec Matthew Polenzani dans le rôle-titre, Alice Coote en Idamante, Nadine Sierra en Ilia et Elza van den Heever en Elvira. L'unique opéra de Beethoven, Fidelio, sera illuminé par la présence d'Adrianne Pieczonka dans le rôle de Leonora. Michael Volle et Dolora Zajick seront à l'affiche de Der Fliegende Holländer tandis que Nina Stemme et Stuart Skelton incarneront les amants éternels de Tristan und Isolde.

Sierra Rigoletto, Met, 2015

Signalons également qu'Anna Netrebko et Dmitri Hvorostovsky seront tous deux à l'affiche d'Eugène Onéguine et que Kristine Opolais chantera Rusalka dans une nouvelle production de Mary Zimmerman.

Hvorostovsky Netrebko Guerre et Paix, Met, 2002

 

16 février 2016

"Les quatre meilleurs chanteurs du monde"

Une célèbre boutade, attribuée parfois à Arturo Toscanini, parfois à Tullio Serafin ou Enrico Caruso, dit que "pour distribuer Il Trovatore il vous suffit des quatre meilleurs chanteurs du monde". Sans aucun doute, l'Opéra de Paris s'est donné les moyens de la réussite en engageant quatre des meilleurs, voire les meilleurs, chanteurs verdiens actuels. Avant de parler de cette distribution idéale, parlons du cinquième rôle de cet opéra : Ferrando, le chef des gardes du Comte. Roberto Tagliavini délivre une interprétation passionnante depuis son air d'entrée jusqu'à l'arrestation d'Azucena au début du III. Belle voix de basse, timbre chaud et technique irréprochable lui permettent de brosser en quelques scènes un personnage profondément hanté par le passé et assoifé de vengeance.Netrebko Il Trovatore, Bastille, 2016

La voix solaire de Marcelo Alvarez fait merveille dans le rôle de Manrico. On admire toujours ce chant naturel et sans fard ainsi que cette voix dorée et lumineuse. Dommage que ce chanteur hors-pair ne soit pas un acteur de la même ampleur. Si sa rivalité avec le Comte est plutôt crédible, son amour avec Leonora paraît singulièrement artificiel.

Son rival en guerre et en amour est chanté par Ludovic Tézier. Baryton verdien dans la lignée directe de Piero Cappucilli et Renato Bruson, il dessine le portrait d'un Conte di Luna orgueilleux, violent et pervers. Dès son entrée au I, il déploie des qualités vocales époustouflantes : sens de la ligne sans pareil, notes tenues sur le souffle, voix homogène aux aigus éblouissants. Et quelle élégance dans le chant et le jeu ! Quelle noblesse, même dans les passages les plus tendus, qui s'accorde si bien au personnage. Le public ne s'y trompe pas, gratifiant son air "Il balen del suo sorriso" d'une longue et bruyante ovation amplement méritée.Tézier Il Trovatore, Bastille, 2016

Ekaterina Semenchuk fait des débuts fracassants à l'Opéra de Paris. Voix profonde, chaude et ronde, timbre de bronze aux reflets mordorés, la mezzo russe joue de ces avantages ainsi que de ses aigus précis et faciles et de ses graves riches pour brosser une Azucena de chair et de sang, hantée par les fantômes du passé. Ses "Mi vendica" glacent littéralement le sang. Ses deux duos avec Marcelo Alvarez sont des moments de pure magie. Elle est proprement effrayante dans la scène du bûcher et dans son exhortation au meurtre du Comte. Son désespoir final est si crédible qu'on en pleurerait.Semenchuk Il Trovatore, Bastille, 2016

Anna Netrebko en Leonora était très attendue. Elle avait dû annuler les deux représentations précédentes pour raison de santé. Ce soir la soprano russe semble remise. Seule une descente étranglée dans "D'amor sull'ali rosee" témoigne de sa récente bronchite. Pour le reste, elle incarne une Leonora particulièrement crédible. Timbre opulent et sensuel ainsi qu'une présence scénique incandescente nous conquièrent dès son entrée et nous tiennent en haleine jusqu'aux dernières notes.Netrebko Il Trovatore, Bastille, 2016

La mise en scène d'Alex Ollé transpose l'action pendant la Première Guerre Mondiale. Le dispositif scénique est beau et ingénieux. Des pavés montent et descendent du sous-sol jusqu'aux tringles. Cependant, cette production présente un défaut, malheureusement commun : l'absence de direction d'acteurs. Les chanteurs ont visiblement été livrés à eux-mêmes. Et s'ils ont tout de même tiré leur épingle du jeu, c'est parce qu'ils ont su compenser cette lacune par un investissement personnel et une qualité vocale hors-norme. Que restera-t-il avec une distribution moins prestigieuse ?

Quoiqu'il en soit, on gardera un souvenir impérissable de cette soirée exceptionnelle portée par "les quatre meilleurs chanteurs du monde".

 

 

Netrebko Tézier Il Trovatore, Bastille, 2016

 

 

 

 

 

 

 

Il Trovatore, Opéra de Giuseppe Verdi sur un livret de Salvatore Cammarano, 1853

Il Conte di Luna : Ludovic Tézier

Leonora : Anna Netrebko

Azucena : Ekaterina Semenchuk

Manrico : Marcelo Alvarez

Ferrando : Roberto Tagliavini

Ines : Marion Lebègue

Ruiz : Oleksiy Palchykov

Un vecchio zingaro : Constantin Ghircau

Un messo : Cyrille Lovighi

 

Direction musicale : Daniele Callegari

Mise en scène : Alex Ollé

Orchestre et choeurs de l'Opéra National de Paris

Opéra Bastille, lundi 15 février 2016

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13 février 2016

De l'énergie à revendre...

Cette production d'Il Barbiere di Siviglia, signée Damiano Michieletto, avait été crée à Genève en 2010 avant d'être jouée à Paris en 2014 avec Karine Deshayes en Rosina et Florian Sempey. Cette année, elle est reprise avec une distribution prestigieuse qui réunit des chanteurs belcantistes de renom tels Nicola Alaimo ou Lawrence Brownlee. La mise en scène de Michieletto est toujours aussi impressionante par son énergie et sa vitalité. Les actions se déroulent tantôt sous les fenêtres de Don Bartolo, tantôt à l'intérieur même de la maison dans les différents étages. On monte les escaliers, on les descend, on passe de pièce en pièce, le décor tourne à tout moment : quel dynamisme !

Il Barbere di Siviglia, Bastille, 2016

Côté orchestre, on est emballé par la vision très légère, délicate et ciselée que Giacomo Sagripanti propose d'Il Barbiere di Siviglia. L'ouverture est extrêmement personnelle et originale.

Arduini Yende Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Pour ce qui est des chanteurs, on est littéralement emporté à quelques exceptions près. Tout d'abord, la jeune soprano française Anais Constant est une Berta de très haute école. Son air "Il vecchietto cerca moglie" est un très beau moment. L'actrice dessine un personnage de femme vieillissante et solitaire très touchant.

Le choix d'une soprano pour chanter Rosina nous paraît peu judicieux, surtout après que des mezzo telles que Teresa Berganza, Frederica Von Stade ou Joyce DiDonato ont définitivement reconquis le rôle. On se souvient, de plus, que Rossini ne supportait pas les Rosina sopranos qui se permettaient de rajouter toutes sortes de vocalises qu'il n'avait pas écrites. Une fois cette réserve faite, on peut toute fois constater que Pretty Yende est une Rosina scéniquement très crédible aux vocalises personnelles et imposantes.Brownlee Yende Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Du côté des messieurs, il n'y a que des éloges à faire. Tous sont parfaitement en adéquation avec l'écriture et le comique rossinien. Alessio Arduini est un Figaro de bonne tenue. Il maîtrise parafaitement son rôle de factotum malicieux.Arduini Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Lawrence Brownlee fait merveille en Conte di Almaviva. Inhabituellement gauche et bouffon, il fait rire la salle par ses pitreries tout au long de l'opéra. Cependant, c'est dans l'air "Ah, il più lieto" que le ténor américian nous a le plus ému. Brownlee Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Nicola Alaimo qui s'est affirmé ces dernières années comme un des chanteurs incoutournables du répertoire rossinien campe un Don Bartolo vocalement irréprochable. Prononciation limpide, agilité époustouflante et timbre immédiatement reconnaissable sont au rendez-vous pour le plus grand plaisir du spectateur. Son personnage, plus fouillé psychologiquement qu'il n'est coutume, est à la fois inquiétant et drôle.Alaimo Brownlee Yende Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Ildar Abdrazakof est un Don Basilio d'exception. Vocalement, le chanteur russe donne l'impression d'effectuer une promenade de santé dans un répertoire pourtant complexe. Sa voix grave et chaude d'authentique basse russe passe sans aucune difficulté la rampe. Il dresse le portrait d'un Don Basilio conspirateur et presque paranoïaque dans sa première intervention puis complètement déjanté. On reste pantois devant un tel investissement scénique allié à une telle perfection vocale.

Abdrazakof Alaimo Arduini Brownlee Constant Yende Il Barbiere di Siviglia, Bastille, 2016

Il Barbiere di Siviglia, Gioacchino Rossini, 1816

Figaro : Alessio Arduini

Il Conte d'Almaviva : Lawrence Brownlee

Rosina : Pretty Yende

Don Bartolo : Nicola Alaimo

Don Basilio : Ildar Abdrazakov

Berta : Anais Constant

Fiorello : Pietro Di Bianco

Un ufficiale : Laurent Laberdesque

 

Direction musicale : Giacomo Sagripanti

Mise en scène : Damiano Michieletto

Orchestre et choeurs de l'Opéra National de Paris

Opéra Bastille, vendredi 12 février 2016

10 février 2016

Une éblouissante nouvelle saison pour l'Opéra National de Paris

 

Jonas Kaufmann chantera dans deux opéras en 2016-2017 à l'ONP

Aujourd'hui, 10 février 2016, Stéphane Lissner à officiellement dévoilé la nouvelle programmation de l'Opéra National de Paris. On ne reparlera pas ici des nombreuses fuites et conjectures qui ont enflammé les réseaux sociaux ces derniers jours. 

 

Philippe Jordan, le directeur musical de l'Opéra National de Paris

 

 

L'Opéra National de Paris s'est, comme l'année dernière, offert le luxe de distributions prestigieuses gorgésdes stars les plus demandées du monde lyrique. La saison 2016-2017 s'ouvrira somptueusement à l'Opéra Bastille avec une reprise de la production de Tosca de Pierre Audi où l'on pourra entendre Anja Harteros, Bryn Terfel et Marcelo Alvarez, seul rescapé de l'équipe de création. En octobre 2016, une nouvelle production de Samson et Dalila par Daniele Michieletto, dirigé par Philippe Jordan occupera la scène de Bastille avant de laisser place en octobre-novembre à Lucia di Lammermoor avec Pretty Yende dans le rôle-titre. En novembre, toujours à Bastille, une reprise des Contes d'Hoffmann de Robert Carsen sera l'occasion pour l'Opéra National de Paris de présenter une distribution de rêve : Sabine Deviehle, Kate Aldrich, Ermonela Jaho, Stéphanie d'Oustrac, Yann Beuron et le grand Jonas Kaufmann, tout ce petit monde sous la baguette de Philippe Jordan. En décembre, Carlo Rizzi dirigera un diptyque Cavalleria Rusticana / Sancta Susanna avec, entre autres, Elina Garanca et Anna Caterina Antonacci. A Garnier, Véronique Gens et Stanislas de Barbeyrac uniront leurs forces dans Iphigénie en Tauride de Gluck avec Bertrand de Billy dans la fosse. En janvier-février, Philippe Jordan dirigera Lohengrin avec Jonas Kaufmann, Martina Serafin et René Pape. Attention la distribution changera en février. Toujours à Bastille, l'Opéra National de Paris reprendra Die Zauberflöte mise en scène par Robert Carsen avec Stanislas de Barbeyrac et Pavol Breslik en alternance, Florent Sempey, René Pape, Nadine Sierra et Sabine Devielhe. A Garnier, Anne Teresa de Keersmaeker mettra en scène un nouveau Così fan tutte avec Frédéric Antoun. De mars à juillet, Carmen sera à l'affiche avec Roberto Alagna et Bryan Hymel en Don José, Ildar Abdrazakof en Escamillo, Elina Garanca en Carmen et Aleksandra Kurzak et Maria Agresta en Micaëla. Le 24 mars sur la scène du Palais Garnier sera donné Béatrice et Bénédicte en version de concert, dirigé par Philippe Jordan avec Floriant Sempey, Stanislas de Barbeyrac, Sabine Devielhe et Stéphanie d'Oustrac. De mai à juin, Anna Netrebko en alternance avec Sonya Yoncheva sera Tatiana face à l'Eugène Onéguine de Peter Mattei dans la mise en scène de Willy Decker. La mise en scène de Claus Guth sera reprise à Bastille avec Vittorio Grigolo et Nadine Sierra. La saison se clora sur La Cenerentola dans une nouvelle mise en scène de Guillaume Gallienne qui fera à cette occasion ses débuts dans le monde lyrique.

 

Anna Netrebko (Leonara dans

 

24 janvier 2016

Un Werther et une Charlotte incandescants

La mise en scène de Werther par Benoît Jacquot a été achetée en 2010 par Nicolas Joël dans le but d'offrir un écrin où les plus grands interprètes pourraient se succéder sans problèmes théâtraux majeurs. Sans aucun doute, on peut dire que cet objectif a été atteint : après Jonas Kaufmann et Sophie Koch en 2010 puis Roberto Alagna et Karine Deshayes l'année passée, c'est au tour de Piotr Beczala et Elina Garanca d'endosser la veste bleue et la robe blanche de Werther et Charlotte. La mise en scène en question impressionne toujours par ses décors somptueux et ses costumes agréables à l'oeil. Beczala Garanca Werther, Bastille, 2016

La direction musicale avait originellement été confiée à Alain Lombard. Celui-ci a été remplacé par Michel Plasson qui a lui-même annulé. C'est donc le jeune Giacomo Sagripanti qui a dirigé la représentation. Sa direction est vivante et inspirée. Le drame avance avec énergie sans pour autant exclure les passages plus élégiaques. L'Orchestre de l'Opéra de Paris sonne magnifiquement.

Du côté des chanteurs, on est très favorablement impressionné par la Sophie d'Elena Tsallagova. Sa voix est pure, claire et agile. Chacune de ses interventions est un charmant moment de légèreté et d'innocence. Son intervention à l'acte II est particulièremnt fraîche et émouvante.

Stéphane Degout est un superbe Albert. Ecrasant d'autorité, le timbre rayonnant et la diction parfaite du bartyon français font merveille dans ce rôle qu'il transcende.

Beczala Degout Werther, Bastille, 2016

 

Le rôle de Charlotte trouve en Elina Garanca une interprète idéale. Authentique mezzo-soprano au timbre sensuel et profond, elle possède de magnifiques graves puissants et sonores ainsi que des aigus lumineux et rayonnants. Sa diction française, malheureusement un peu pâteuse en certains endroits, est son seul point faible. On admire en revanche l'évolution qu'elle fait suivre à son personnage. D'abord innocente et impassible, sa Charlotte devient au fil des actes une femme tourmentée et passionnée.Beczala Garanca Werther, Bastille,2016

Enfin, le Werther de Piotr Beczala laisse béat d'admiration. Sa diction est parfaitement intelligible. Sa voix est lumineuse et claire, ses aigus sont triomphants. On est transporté par ce chant élégant et précis. C'est une véritable leçon de style que délivre le ténor polonais qui se confirme comme une des figures incontournables du chant français actuel. Quant au personnage, finement dessiné, chacun des ses traits de caractère est habilement mis en relief. Ce Werther est sensible, tendre et mélancolique mais aussi passionné et désespéré.Beczala Garanca Werther, Bastille, 2016

On retiendra sans aucun doute cette soirée, illuminée par ses Werther et Charlotte d'exception.

 

Werther, Jules Massenet, 1892

Werther : Piotr Beczala

Charlotte : Elina Garanca

Albert : Stéphane Degout

Sophie : Elena Tsallagova

Le Bailli : Paul Gay

Schmidt : Rodolphe Briant

Johann : Lionel Lhote

Brühlmann : Piotr Kumon

Kätchen : Pauline Texier

 

Direction musicale : Giuseppe Sagripanti

Mise en scène : Benoît Jacquot

Orchestre de l'Opéra de Paris

Maîtrise des Hauts-de -Seine

Choeur d'enfants de l'Opéra de Paris

 

Opéra Bastille, Opéra National de Paris, 23 janvier 2016

17 janvier 2016

Une soirée époustouflante

On n'avait pas vu Les Pêcheurs de Perles au Met depuis l'époque du grand Caruso. Après des décennies d'absence, cet opéra de Bizet revient sur la première scène américaine sous l'impulsion de Diana Damrau.

 

 

Damrau Les Pecheurs de Perles, Met, 2016

 

 

 

La mise en scène de Penny Woolcock est un des atouts majeurs de la soirée. Elle transpose avec succès l'action dans une sorte de bidonville bordé par la mer. Les chanteurs évoluent sur des ponts, des escaliers et même des barques. L'orage du final de l'acte II est rendu avec brio. Quant à l'incendie final, il est d'une vraisemblance effrayante. Mais la grande surprise, c'est ce magnifique lever de rideau sur un écran bleu (la mer) où des acrobates plongent pour chercher des perles. Quelle merveille ! De plus, on ne peut que louer cette direction d'acteurs impeccable qui permet à chaque artiste d'aller au bout de son personnage.

Les Pêcheurs de Perles, Met, 2016

Dans la fosse, Gianandra Noseda et l'orchestre du Met soutiennent le drame. On apprécie particulièrement cette capacité à créer des atmosphères calmes et recueillies dans les prières ou déchaînées et effrayantes dans les finals des actes II et III. Les choeurs sont incroyables d'homogénéité, d'intensité et de crédibilité dramatiques.

Chez les chanteurs, on est tout simplement charmé par les voix et la diction pafaite des quatre artistes. Nicolas Testé, tout d'abord, est un excellent prêtre. Sa voix est grave et ronde, le timbre chaud, l'artiste d'une grande autorité; que demander de plus ?

Damrau Testé LesPêcheurs de perles, Met, 2016

Matthew Polenzani reprend le flambeau de Caruso en Nadir. Il triomphe haut la main de son rôle. Sa voix est claire, habile dans les passages les plus assassins de la partition. Son personnage est habilement dessiné. On voit réellement Nadir, amoureux fou de Leïla et conscient de trahir ses serments.

Damrau Polenzani Les Pêcheurs de Perles, Met, 2016

 

Son puissant rival est incarné par Mariusz Kwiecien, voix de bronze aux reflets de basse. Le baryton polonais est sidérant dans le rôle de Zurga. A l'acte I, il est tout dévoué à son village et à Nadir. Mais à l'acte II, quand il découvre la trahison de Nadir, le chef des pêcheurs s'efface pour laisser place à l'ami trompé et furieux. Sa condamnation des amants est terrifiante. Puis vient l'acte III, après son air "Ô Nadir" tout en introspection douloureuse, c'est le duo avec Leïla. D'une violence terrible, l'affrontement fait froid dans le dos. Quelle rage on sent dans la voix de l'artiste, quel investissement dramatique ! Mariusz Kwiecien revient sur scène au final pour délivrer les amants. Après un bref mais somptueux trio avec Diana Damrau et Matthew Polenzani, il s'effondre devant le village en feu. On ne peut que s'incliner devant cette performance. Bravo !

Damrau Kwiecien Les Pêcheurs de Perles, Met, 2016

Enfin, Diana Damrau est Leïla. La soprano trouve ici un de ses plus beaux rôles. Pendant sa profession de foi à l'acte I, ses "Je le jure" annonce déjà le drame. La prière "Ô dieu Brahma" montre la chanteuse très à son aise et à son avantage dans ces vocalises aigues et agiles. Et quelle tendresse, quelle innocence dans cette prière qui devient un chant d'amour. La Leïla qu'on retrouve après l'entracte va évoluer. Après un enchanteur "Ton coeur n'a pas compris le mien" avec Matthew Polenzani, elle devient victime d'une loi qui la condamne à une mort affreuse. On sent dans le chant devenu plus corsé le désespoir du personnage. A l'acte III, sa rencontre avec Zurga est un des sommets de l'oeuvre. Elle se jette à ses pieds, supplie puis menace. Puis, quand elle comprend que tout est perdu, la malédiction qu'elle lance sur Zurga laisse cloué dans son fauteuil. Le final est exécuté à merveille. On sent d'abord toute sa résignation à son sort puis son bonheur quand elle est réunie à jamais à celui qu'elle aime.

Damrau Les Pêcheurs de Perles, Met, 2016

On sort de cette soirée conquis et enchanté. On n'oubliera pas de sitôt une telle représentation où chant et jeu, où musique et théâtre ont été si bien mariés.

 

Les Pêcheurs de Perles, Georges Bizet 

Leïla :Diana Damrau

Nadir : Matthew Polenzani

Zurga : Marius Kwiecien

Nourabad : Nicolas Testé

 

Direction musicale : Gianandrea Noseda

Mise en scène : Penny Woolcock

Orchsetre et choeurs du Metropolitan Opera de New York

Metropolitan Opera, 16 janvier 2016

2 janvier 2016

Nadine Sierra : une étoile est née

 

Dans le ciel du monde lyrique d'aujourd'hui, une nouvelle étoile brille depuis quelques années, toujours plus lumineuse, toujours plus éblouissante. Cette étoile, c'est la jeune Nadine Sierra. OpéraBlog retrace le début de carrière de la prometteuse soprano américaine.

Nadine Sierra

Nadine Sierra est née en 1988 aux Etats-Unis. Elle se forme au Mannes College of Music de New York puis à la Music Academy of the West. Elle fait ses débuts sur scène encore adolescente à l'opéra de Palm Beach. A quinze ans, elle est remarquée à la télévision (dans le cadre de l'émission From the top) où elle chante le célébrissime "O mio babbino caro" extrait de Gianni Schicchi de Giacomo Puccini. En 2009, elle chante en duo avec Thomas Hampson au United States Supreme Court Building. En 2010, elle est de nouveau invitée sur le plateau de From the top. Aux côtés de Thomas Hampson, elle crée les rôles de Juliet et Barbara dans l'opéra de Christopher Theofanidis Heart of a soldier au San Francisco Opera en 2011. Elle enchaîne les prises de rôle avec notamment Euridice dans Orfeo ed Euridice, Gilda dans Rigoletto, Musetta dans La Bohème, Norina dans Don Pasquale, le rôle-titre de Lucia di Lammermoor et Pamina dans Die Zauberflöte. Elle a fait ses débuts au Teatro di San Carlo de Naples en 2013, à Zürich, à l'Opéra National de Paris et au Metropolitan Opera en 2015. 

Sierra La Bohème, San Francisco, 2015

Sa voix est  celle d'une authentique soprano lyrique. Son timbre est charnu et chaud. Elle possède des aigus lumineux et une agilité impressionnante dans les vocalises. 

Entendre Nadine Sierra

 

Où voir Nadine Sierra ?

  • De janvier à février 2015 : Rigoletto (Gilda), Giuseppe Verdi, Teatro alla Scala di Milano
  • Mars 2016 : Orfeo ed Euridice (Amor), Christophe Willbald Gluck, Staatsoper unter den Liden (Berlin)
  • Avril 2016 : La Sonnambula (Amina), Vincenzo Bellini, Teatro Filarmonico (Verona)
  • Juin 2016 : A Midsummer Night's Dream (Tytania), Felix Mendelsson, Palau de les Arts (Valencia)

    Sierra Rigoletto, Met, 2015

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